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Qu’est-ce qu’un juste - un tsadik ?

Qu’est-ce qu’un juste - un tsadik ?

Parashat Vayéra -

Nous avons l’habitude de découper la Torah en chapitres, et lorsque nous donnons une référence, elle s’appuie sur cette division en chapitres.

Ainsi, notre parasha   commence au début du chapitre 18 du livre de la Genèse, qui débute avec la visite des trois envoyés chez Abraham puis se poursuit avec la négociation qui se déroule entre Abraham et Dieu au sujet du sort de Sodome.

Ensuite le chapitre 19 nous raconte l’arrivée des envoyés chez Loth, la destruction de Sodome et Gomorrhe, et se termine sur l’histoire de Loth et de ses deux filles.

Il est clair que ce découpage en chapitre, inventé par un futur archevêque de Canterbury en 1229, ne peut être satisfaisant pour notre compréhension réelle du texte. Il nous faut pour cela revenir à la plus antique des traditions, non celle de la parasha   d’aujourd’hui, créée à Babylone à l’époque talmudique, mais une tradition beaucoup plus ancienne et qui est même peut-être aussi antique que le texte lui-même. Il s’agit de ces découpages en "parasha   ouverte" et parasha   fermée" que toute personne ayant vu de près un sefer torah peut immédiatement identifier en regardant le texte qu’il a devant lui : il n’existe aucune interruption dans celui-ci, sauf des demi-lignes blanches (parashiot fermées) ou des lignes entièrement blanches (parashiot ouvertes).

Si l’on regarde le texte de notre parasha   dans un sefer torah, on s’aperçoit immédiatement que les deux chapitres que nous signalions plus haut forment une seule et même parasha  . Il n’y a aucune interruption dans le déroulement des mots. La tradition nous demande donc de comprendre ces 71 versets comme un seul récit. Il nous faut donc trouver le fil conducteur qui unit ces différents épisodes, dont certains nous paraissent très éloignés. Qui y-a-t’il donc de commun entre l’annonce de la naissance d’Isaac et la destruction de Sodome ?

Ce lien se trouve dans la différence du sort d’Abraham et de Loth d’une part, et de celui des habitants de Sodome d’autre part. Nous sommes en présence d’un juste, Abraham, d’un semi-juste, Loth (mais qui l’est suffisamment pour être sauvé), et d’un ensemble de criminels. Comment la Torah nous présente t’elle ce fait d’être juste ? D’une manière fort simple, grâce à un commandement qui semble marquer la différence essentielle entre les deux catégories et que l’on nomme en hébreu "hakhnassat orchim", l’accueil des visiteurs, l’empressement envers les étrangers.

Notre histoire se déroule donc ainsi : Abraham, secondé par Sarah, accueille les visiteurs et accomplit ce commandement d’"hakhnassat orchim". Ayant constaté cette capacité de justice chez Abraham, Dieu lui annonce son intention de détruire Sodome. Abraham réagit en demandant que si l’on trouve des justes parmi les habitants (c’est-à-dire des gens capables de se comporter vis-à-vis des autres de manière totalement gratuite, comme dans le commandement d’"hakhnassat orchim"), que Sodome soit épargnée. Au verset 33 du chapitre 18, Dieu et Abraham se séparent sans qu’il y ait eu encore de décision définitive. Il faut en effet tester la population pour savoir à quoi s’en tenir. D’où la suite du récit lorsqu’au début du chapitre 19 les envoyés viennent à Sodome. Le test est rapidement concluant : l’injustice des habitants de Sodome éclate au grand jour de par leur agression vis-à-vis des visiteurs étrangers. Seuls Loth et sa famille sont restés suffisamment justes, malgré la perversion ambiante, pour être encore capable de réaliser "hakhnassat orchim".

Sodome ne peut donc être sauvé, ce qu’Abraham vient constater au verset 27 lorsqu’il se tient devant la désolation de la destruction. Mais, comme il est rappelé au verset 29, l’intervention d’Abraham a tout de même permis de sauver Loth. Non que Loth soit un "tsadik gamour", un juste complet, comme nous le montre la fin de notre récit à travers la description plutôt scabreuse des relations incestueuses entre Loth et ses filles. Mais il était suffisamment juste pour être quand même sauvé, et ce uniquement grâce à ce commandement d’"hakhnassat orchim".
Nous voyons donc que la tradition liée à la Torah nous souligne l’importance de cet accueil des invités. Les maîtres du Talmud   ne s’y sont pas trompés, donnant une place privilégiée à ce commandement. Le comportement d’Abraham les amène même à affirmer que l’accueil des invités a priorité sur le respect vis-à-vis de la présence de Dieu. Ne serait-ce pas une leçon à méditer pour nombre d’entre nous qui se montrent tellement méticuleux dans les commandements envers Dieu, mais se comportent souvent vers les étrangers d’une manière qui rappelle fâcheusement celle des habitants de Sodome.

Rabbin   Alain Michel – Rabbin   Massorti   à Jérusalem et historien

copyright Jerusalem Post

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