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Les rabbins orthodoxes sont-ils les seuls garants de l’avenir du peuple juif ?

Les rabbins orthodoxes sont-ils les seuls garants de l’avenir du peuple juif ?

Le mouvement Massorti   se permet de ne pas être d’accord avec l’establishment rabbinique orthodoxe  . Cela est-il légitime ? Cela est-il positif et fructueux pour le judaïsme ? Ou au contraire cela est-il dangereux ? Débat…

Question d’un internaute :

Réflexion sur votre approche utopique et irréaliste du judaïsme et de la loi :

[*La force des rabbins   à fixer la loi est indispensable car elle maintient l’unité de la nation*] : cela est comparable aux lois fixées par un parlement : une fois la loi adoptée on ne peut plus la remettre en question sinon on dérive vers l’anarchie ou vers la dictature.

Affaiblir et/ou dénigrer le pouvoir législatif revient à affaiblir l’unité du peuple.

[*Concrètement il est impensable que chaque juif prenne se que bon lui semble de la thora et du shoulchan Arouch....*]

Je suis conscient que beaucoup de loi ne sont plus actuelles, que l’application à la lettre de la loi a pris le dessus sur l’esprit de loi.

Il faudrait reformer sans déstabiliser le pouvoir législatif des rabbins  , car ils ont permis de perpétuer le judaïsme depuis plus de 2000 ans en maintenant l’unité du peuple autour de la loi.

Cordial Shalom,

Pierre

Réponse du rabbin   Yeshaya Dalsace

Cher Monsieur,

[*Irréalisme et utopies sont au cœur du judaïsme. Sans cela, non seulement le peuple juif n’aurait jamais existé mais encore il aurait disparu depuis longtemps.*]

Il est vrai que les rabbins   incarnent une continuité du peuple juif et sont censés être les garants de son avenir.

Le mouvement Massorti   qui est un mouvement rabbinique, fondé par des rabbins   et dirigé par des rabbins  , ne saurait dire le contraire. Un rabbin   Massorti   n’est pas moins rabbin   qu’un rabbin   orthodoxe  .

[*Il y a eu de tout temps chez les rabbins   des opinions différentes sur tous les sujets possibles et imaginables. Le mouvement Massorti   incarne une opinion rabbinique légitime qui se permet de ne pas être d’accord avec une certaine ligne fondamentaliste orthodoxe   actuelle.*]

Il est vrai que cela sape un peu l’autorité des ultraconservateurs, mais cela n’est pas forcément un mal. La remise en cause étant toujours bénéfique pour tous (y compris pour nous même bien entendu).

Deux orthodoxies à ne pas confondre :

[*Il nous faut d’abord préciser de quelle orthodoxie   on parle. Il en existe deux, l’une ouverte et moderne qui cherche à renouveler le judaïsme par petites touches et se trouve extrêmement proche de ce que prône le mouvement Massorti  .*] Elle a eu dans le passé des figures mémorables (Hayim Herschensohn, Alkalay, Isaac Kook  , Ouziel, Soloveitchik,...) et plus récemment quelques fortes personnalités (Greenberg, Eliezer Berkovits, Leibovitch, David Hartman ou Léon Achkenazi...). [*Cette orthodoxie   n’est nullement visée par nos remarques et un constant dialogue, voir une forte collaboration, reste établie entre l’orthodoxie   moderne et les autres mouvements modernistes du judaïsme.*] Cependant, la partie moderniste de l’orthodoxie   a perdu peu à peu ces quelques dernières années les quelques leviers de pouvoir qu’elle possédait encore. Aujourd’hui, elle a adopté un profil bas et vit sous la menace des foudres de la partie plus conservatrice de l’orthodoxie  . Cela est vrai en Israël, aux Etats-Unis et en France.

Mais il en existe également une autre, la partie la plus conservatrice qui a actuellement le vent en poupe. Cette orthodoxie   que l’on appelle communément « les hommes en noir » à cause de leur mode vestimentaire ne manque pas de mérite et sur beaucoup de points présente un intérêt ainsi que des personnalités tout à fait remarquables. Ne pas être d’accord avec cette orthodoxie   là ne veut pas dire lui manquer de respect. Cependant, un peu de lucidité ! Cette orthodoxie   a tendance à fasciner certains juifs modernes sécularisés qui veulent y voir la seule façon possible de continuer à être juif dans la modernité. Elle serait le garant de l’avenir du peuple juif… nous pensons que c’est totalement faux, au contraire, si seule cette école de pensée existait dans le judaïsme ce serait une catastrophe. Cela n’empêchant nullement de reconnaître des quantités de qualité à ces milieux, de tenir compte de leurs écrits, de les fréquenter et de le respecter. Notre point de vue n’est donc pas méprisant mais critique. L’engagement juif possède également bien d’autres facettes, qui n’ont pas moins de valeur.

Le problème ne vient pas de l’existence d’un courant ultraconservateur dans le judaïsme, cela est plutôt bénéfique, mais de son pouvoir hégémonique sur les grandes institutions du judaïsme dans certains pays. Cela est vrai au sein du consistoire   en France et au sein du rabbinat en Israël.

Le discours de ce genre de milieux vis-à-vis du judaïsme moderniste (toutes tendances confondues) est en général très violent (censure systématique) et méprisant. Ils ont tendance à se présenter comme le seul judaïsme possible et légitime. Il est donc nécessaire de remettre certaines pendules à l’heure.

La voie du radicalisme serait la bonne ?

Vous semblez croire que respecter les opinions des décisionnaires rabbiniques radicaux en tout point est salvateur pour le peuple juif.

Cette assertion est des plus contestables. [*Si on fait le bilan de la ligne ultraconservatrice du judaïsme depuis 150 ans, c’est en grande partie une vraie catastrophe.*]

Durant le siècle dernier les rabbins   radicaux ont maintenu leur public parmi les juifs d’Europe de l’Est dans un tel état de misère économique et culturelle que sitôt ces juifs arrivaient dans un pays occidental, qu’ils s’empressaient de tout laisser tomber pour se débarrasser d’un joug trop lourd pour eux (on observe à peu près le même phénomène avec les juifs orientaux et d’Afrique du Nord).

Ces mêmes rabbins   faisaient tout pour que les gens ne partent pas.

Ils luttèrent avec véhémence contre le sionisme. Le génocide nazi s’occupa de leur donner tort.

Depuis la seconde guerre mondiale, la minorité de ces rabbins   radicaux qui a survécu à l’extermination a adopté une ligne si dure que les 8/10 de la diaspora ne s’y retrouveraient pas du tout s’il n’existait pas d’autres institutions juives qu’elles soient religieuses ou laïques et ce seraient certainement coupés totalement du judaïsme.

En Israël, ces mêmes milieux, qui ont hélas actuellement le pouvoir dans le corps rabbinique israélien, ont adopté une position économiquement indéfendable : passer son temps à étudier sur le dos des autres, une autre stratégiquement suicidaire : refuser à tout prix de servir dans l’armée.

Sur le plan de la Halakha   et des positions théologiques, ces mêmes cercles ont adopté des positions si tranchées et si caricaturales que la majorité de la société israélienne associe maintenant la religion juive à l’obscurantisme et lui tourne le dos parfois radicalement.

Enfin, sur une question aussi cruciale que celle de la possibilité d’intégrer les conjoints et enfants de mariages mixtes dans le judaïsme, ces mêmes rabbins   ultraconservateurs ont élevé un mur quasi infranchissable, provoquant à terme un affaiblissement démographique énorme pour le peuple juif, s’il n’existait pas heureusement d’autres portes d’entrée dans le judaïsme.

Sur la question de l’intégration intellectuelle des juifs et du judaïsme dans la communauté mondiale, qui représente également un enjeu d’importance, les rabbins   ultraconservateurs présentent une façade fondamentaliste du judaïsme qui n’amène nullement à son respect aux yeux des intellectuels de ce monde, qu’ils soient juifs ou non.

[*La plupart des grands projets que le peuple juif a produits ces 150 dernières années, ne sont nullement le fait du judaïsme ultra orthodoxe   mais bien celui d’un judaïsme moderne et émancipé, qu’il soit religieux ou laïc.
*]

Cela est vrai pour la plupart des grandes œuvres de la pensée juive moderne (religieuse et sécularisée), cela est vrai pour la culture juive moderne dans tous les domaines (peinture, littérature, théâtre, cinéma, etc.), cela est vrai pour la place d’honneur qu’ont su prendre les études juives dans la plupart des grandes universités du monde, notamment en Amérique, cela est vrai surtout pour l’œuvre immense que représente la résurrection de la langue hébraïque (grâce à un homme, Ben Yehouda, qui fut mis au ban de la société par les religieux), mais cela est vrai encore plus pour la formidable réalisation du sionisme politique qui incarne une très nette remise en cause de la pensée rabbinique classique. Ce qui valu d’ailleurs les foudres des milieux conservateurs contre les rares rabbins   orthodoxes   à adopter le sionisme.

[*La plupart des autorités rabbiniques orthodoxes   radicales ont été strictement incapables de voir venir les dangers, d’inventer des solutions, de répondre aux défis si nombreux de la modernité.*]

Ils ont prouvé qu’ils ne sont plus le garant de rien, sinon de leur propre vision que l’on peut légitimement trouver désuette et de leur ligne théologique intellectuellement peu défendable. C’est pourquoi [*il me semble très hasardeux de présenter ce courant du judaïsme comme le garant de son avenir…*]

La critique et la lucidité ne veulent pas dire le mépris

Cela ne veut pas dire que les juifs orthodoxes   radicaux n’ont pas de mérite. Ils en ont bien sûr, celui notamment de maintenir la flamme de l’étude juive de masse. [*La renaissance du milieu ultra religieux après-guerre marque également une réalisation remarquable. C’est le garant de la survie de la frange fondamentaliste du judaïsme et l’on peut s’en réjouir. Mais ce n’est nullement le garant de la survie du judaïsme en général en tant que culture dynamique, en tant que grande religion et encore moins en tant que peuple.*]

Sur la question plus pointue de la Halakha   elle-même, vous comparez cela à un parlement, [*le propre d’un parlement est de maintenir des débats démocratiques est ouverts. Ces débats n’existent pas ou très peu dans le corps rabbinique orthodoxe   aujourd’hui. Le Parlement a été muselé par un autoritarisme théocratique et gérontocratique qui ne fait pas grand honneur au judaïsme.*]

Le propre de la Halakha   et de ses débats est qu’ils ont toujours été soumis à des forces contradictoires et une totale ouverture d’opinion. C’est là une des sources de son génie et de sa pertinence.
[*Enfermer la Halakha   dans une position piétiste, voire bigote, ne me semble pas garantir son avenir.*]

[*Les rabbins   du mouvement Massorti   ainsi que certains rabbins   de l’orthodoxie   moderne, osent avancer des positions halakhiques ouvertes et innovatrices. Ce sont ces positions qui sont la garantie de la pertinence de la Halakha   pour l’avenir et non l’inverse.*] A la condition de pousser le débat avec sérieux et de ne pas s’enfermer dans une ligne idéologique sans nuances.

La Halakha   aujourd’hui

Enfin, il existe un changement majeur dans l’histoire juive depuis environ 200 ans : la perte de pouvoir effectif de la Halakha  . Le mode de vie des juifs et donc du judaïsme a totalement changé. Plus personne n’a l’autorité pour imposer la loi aux individus, contrairement à ce qui se passait auparavant, cela y compris chez les ultra orthodoxes   car l’individu peut toujours rompre avec son milieux s’il le désire (pas toujours facile d’ailleurs). De ce fait, [*la Halakha   est devenu un droit théorique qui garde sa pertinence pour les seules personnes qui acceptent librement de s’y soumettre.*] Pour les autres, la majorité des juifs, hélas à mes yeux de juif halakhique, la Halakha   a perdu toute pertinence depuis longtemps. C’est pourquoi, l’autorité des rabbins   aujourd’hui, n’existe que pour ceux qui la reconnaissent, ils sont loin de former la majorité du peuple juif.

Il me semble que [*la Halakha   est susceptible d’intéresser les juifs dans la mesure où elle dit des choses pertinentes et répond à leurs problèmes actuels. Sinon, la Halakha   risque fort d’être le lot d’une petite secte étrange où un sujet d’étude pour les chaires d’histoire.*]

La Halakha   n’est pas l’exclusivité de l’orthodoxie   radicale

Le mouvement Massorti   représente une position halakhique divergente sur certains points, les positions adoptées sont tout à fait défendables et méritent en tout cas le débat. [*Le mouvement Massorti   peut être fier de sa contribution à la production de la Halakha   au XXe siècle. Il est notamment le premier et le seul jusqu’à ce jour, à avoir traité avec sérieux la question cruciale de la position de la femme. En faisant cela, il prouve la pertinence moderne de la Halakha   et montre que le judaïsme n’est pas seulement une religion du passé.*]

Ce sont ce genre d’innovations et de capacité d’innovation de la part de certains rabbins   courageux qui ont permis la survie du judaïsme.

Dans les milieux ultras orthodoxes  , il existe également une production halakhique innovatrice, abondante et très importante (Feinstein  , Ovadia Yossef   , Waldenberg,…) nous en tenons compte et la respectons. Cependant, elle se cantonne à des questions techniques (les nouvelles technologies, l’éthique médicale, la kashrout  , …) qui ont bien sûr leur pertinence mais elle ne recherche pas à explorer des questions de fond qui sont forcément bouleversantes pour le judaïsme traditionnel (position de la femme, religion face à la démocratie, connaissance historique moderne…)

La survie dans l’histoire n’est pas liée à un renfermement radical

Si les rabbins   de l’époque de la Michna   s’étaient enfermés dans une position ultraconservatrice, (celle présentée par Beit Shamai, Rabbi Eliezer, ...) non seulement le Talmud   n’existerait pas, mais le judaïsme dans son ensemble aurait subi le sort des sadducéens qui ont été laminés par l’érosion de l’histoire. Si au Moyen Âge, des rabbins   courageux, (Maimonide  , Ibn Ezra, Meiri  ) n’avaient pas pris à bras le corps la question de la philosophie, l’élite juive de l’époque aurait fui le judaïsme. Si à l’aune de la modernité, des rabbins   visionnaires (Mendelsohn, Franckel, Hirsch,...) n’avaient pas exploré des positions nouvelles et offert aux juifs un judaïsme compatible avec leurs inspirations, le maintien d’un judaïsme religieux aurait été impossible pour toute une élite intellectuelle juive occidentalisée.

Moi-même, je tiens à le dire, je n’ai aucune envie de vivre sous la houlette des rabbins   de Bnei Brak, avec tout le respect qui leur revient, si seule cette figure là du judaïsme m’était offerte, je ne suis nullement persuadé que je pourrais continuer à être un juif religieux. [*Mon judaïsme est un judaïsme d’avenir parce que c’est un judaïsme que je peux offrir avec fierté à mes enfants sans les enfermer dans un ghetto intellectuel et spirituel.*]

[*La survie dans l’histoire est liée à deux facteurs : la ferme volonté de continuer à exister et la capacité de s’adapter aux nouvelles situations. Le judaïsme a appliqué cette recette tout au long de ses 4000 ans d’histoire, il n’y a aucune raison que cela s’arrête.*]
Se braquer sur des positions idéologiques n’est pas un signe de survie mais de sclérose.

Or du fondamentalisme point de salut ?

[*C’est devenu un véritable cliché dans toutes les religions que de présenter les franges les plus fondamentalistes comme les garants de leur avenir. Or cela n’est vrai ni chez les chrétiens, ni chez les musulmans, ni chez les bouddhistes, ni chez les juifs.*]

[*Dans toutes ces religions la part la plus intéressante et la plus pertinente et celle qui ose s’ouvrir et innover.*] Que serait le christianisme s’il revenait à la mentalité de l’église de la fin du XIXe siècle ? Que serait l’islam s’il se cantonnait à des Khomeiny, des wahhabites ou pire encore des Ben Laden ? Que serait le bouddhisme sans l’intelligence et l’ouverture d’un Dalaï-lama ? Que serait le judaïsme s’il devait se contenter de l’enseignement du Rav Eliachiv et des déclarations fortes en couleurs du rabbin   Ovadia Yossef   ?

Que sera le judaïsme français dans 50 ans s’il se soumet à la ligne idéologique du rabbinat consistorial actuel de plus en plus noyauté par des rabbins   radicaux ?

Le fondamentalisme, y compris celui habillé d’un discours de pseudo modernité, garant de l’avenir des religions ? Il faut oser affirmer le contraire, [*les franges les plus conservatrices des religions incarnent leur faillite intellectuelle et morale.*] [*Elles sont les meilleurs arguments de l’anticléricalisme militant, elles font fuir les meilleures de leurs membres.*]

En conclusion, j’affirme qu’un juif soucieux de l’avenir du peuple juif et du judaïsme doit prendre ses responsabilités, oser poser des questions, oser remettre en cause ce qui doit être remis en cause, et si cela correspond à ce qu’il croit être le meilleur du judaïsme, se battre pour un judaïsme moderne, ouvert et authentique. Ce qu’en pense la frange radicale et fondamentaliste du judaïsme doit être le cadet de ses soucis. « Le chien aboie et la caravane passe » dit le proverbe.

L’essentiel est que cela soit fait par soucis de l’avenir et de l’authenticité, "lechem chamayim" dit-on en hébreu et non pour dénigrer l’autre sans lui accorder le crédit de ce qu’il est.

Yeshaya Dalsace est rabbin   Massorti   à Nice et l’éditeur de ce site.

Notes :

A ce sujet on lira avec profit le rapport officiel :
"Le peuple juif : Entre Renaissance et déclin"

http://www.massorti.com/spip.php?ar...

On peut également écouter quelques paroles de Jacques Attali qui abonde en mon sens.

http://www.akadem.org/sommaire/them...

Pour mieux connaître les penseurs de l’orthodoxie   moderne auxquelles nous avons fait allusion voici quelques liens :

Sur Eliezer Berkovits : http://en.wikipedia.org/wiki/Elieze...

Sur David Hartman
http://en.wikipedia.org/wiki/David_...

Sur la question de l’orthodoxie   moderne
www.edah.org/backend/JournalArticle...

Plus généralement sue la Modern Orthodoxie   tout le site

http://www.edah.org/

Messages

Quelle gaava !

Vous croyez avoir un esprit plus aiguisé que les talmidei hakhamim ?

Vous souhaitez faire participer les femmes au rituel et avoir un rôle dans la communauté ? (edah.org).

Mais savez -vous que dans le judaïsme les femmes participent déjà au rituel et ont déjà un rôle central dans la communauté.

Que recherchez-vous ?
Vous pensez que le fait de vivre au 21ème siècle fait de vous, ou de nous, des êtres supérieurs ? Quelle gaava !

Non modestie et responsabilité

Cher Monsieur,

Premièrement, il ne s’agit pas ici de l’opinion d’une seule personne mais de centaines de rabbins   de par le monde, opinion partagée par des millions de juifs, parmi tout ceux ci il y a bien quelques « Talmidei Hakhamim » qui pensent et travaillent sur la question… Nous ne manquons ni de respect envers les autres, ni ne remettons en question leur esprit aiguisé. Nous ne sommes pas d’accord sur certains points, cela s’appelle une Mahloket   (une discussion). Comme celle-ci est « au nom du Ciel », c’est-à-dire pour une bonne cause, elle risque de durer longtemps, comme l’affirment les sages   de la Michna  .

Le rôle et le statut de la femme juive ne sont pas géniaux, pour le moins… C’est vrai cependant qu’il y a pire… mais soyons un peu honnêtes avec nous-mêmes et regardons en face les quelques failles de notre propre culture.

Une partie du judaïsme peut très bien perdurer en gardant un système patriarcal dans lequel la femme maintient un rôle effacé et intérieur, elle est y est mise sur un piédestal comme mère de famille et femme au foyer, cela est tout à fait respectable et ne nous dérange nullement. Le problème est que la majorité des juifs et plus particulièrement des juives n’ont pas envie de vivre ainsi et aspirent à autre chose. Ces femmes sont-elles en rupture avec le judaïsme où le judaïsme est-il capable de penser la place de la femme autrement ? Là est la question tout simplement. Il n’y a vraiment pas de quoi s’énerver mais de quoi réfléchir.

Ce que nous recherchons ? Le bien du peuple juif et de sa religion. Nous n’insultons personne, merci d’en faire de même.

Le fait de vivre au XXIe siècle ne rend nullement supérieur aux sages   du passé. Il ne s’agit pas ici d’une question de supériorité. Il s’agit tout simplement de regarder certains problèmes en face et de les régler. Les sages   l’ont toujours fait. C’est le rôle du sage que de réfléchir et le rôle du rabbin   de proposer des solutions. Les problèmes posés au XXIe siècle ne sont pas ceux posés au XVIe siècle et encore moins au premier siècle. Bien entendu, la pertinence et la sagesse des rabbins   du passé est une formidable source d’inspiration. Notamment, leur capacité à répondre aux questions de leur époque et de leur public. La plupart des grands penseurs du judaïsme l’ont fait à toute période de l’histoire du Judaïsme qui est loin d’être statique. Nous ne sommes pas supérieurs à eux, mais notre sensibilité est différente. Il n’y a aucun mal à cela et encore moins de l’orgueil, mais plutôt une marque de modestie. L’orgueil serait peut-être de croire que le judaïsme est tellement supérieur à tout le reste et placé hors du temps et de toute époque qu’il ne doit jamais se remettre en cause…

Cordial Shalom

Yeshaya Dalsace

Webmaster de Massorti  .com

Non modestie et responsabilité

Bonjour

j’AIMERAIS FAIRE UN COMMENTAIRE !
bravo et merci de vos réponses justes et pertinantes M. le rabbin   !
Pour éclairer votre correspondant, je précise que :
je ne suis pas Massorti  ,issue d’ue famille pied-noire pratiquante, j’essaye du mieux que je peux de suivre la loi de D.. via Moïse, mais, Je m’interesse à toutes les voies y conduisant.
Je ne peux parler que ce dont je suis le témoin objectif :
l’intelligensia juive s’éloigne de la pratique et nous sommes surpris d’apprendre que tel écrivain,tel penseur,tel chercheur,tel professeur en médecine, et je pourrai continuer... est né juif. Certains ne sont même plus ce que "l’on" appelle avec dédain "les juifs de kippour".

Les jeunes,de plus en plus,désertent les synagogues. Les rabbins   s’évertuent chaque chabbat à inciter les hommes à venir mettre les téfilins et faire en sorte que les synagogues continuent à avoir un mynian matin et soir (je le vis chaque samedi)

J’ai constaté avec tristesse- il s’agit de voisins- qu’on avait refusé la circoncision d’un enfant dont la mère était née d’un père juif et d’une mère non juive. Voilà un enfant "perdu" pour le peuple juif ! Pourtant autrefois la filiation se faisait par le père ! (quand on songe que chez les musulmans il suffit de dire trois fois : la chehda ;Voir RIBERI sur les stades de France et de Navarre ; bien sûr allez-vous dire,il ne faut pas se comparer aux musulmans !)

Dans ma communauté, j’ai côtoyé une jeune femme qui souhaitait se convertir au judaîsme, non pour épouser un juif,seulement parce que son coeur était juif -si l’on peut dire- elle mange cacher, elle est chomer chabbat (pour autant qu’on puisse dire cela d’une non juive), ses enfants sont élevés dans notre foi.Elle et eux pratiquent tous les jeÛnes du calendrier,observent toutes les fêtes. Pour tout dire ,elle en savait plus sur la religion que bien des femmes nées juives.
Voici trois fois que le consistoire   lui refuse la conversion sur des broutilles. Elles est découragée ! J
Je peux vous citer mille autres exemples !
Enseignante, j’ai eu maintes et maintes fois eu l’occasion d’entendre les jeunes s’insurger :
"il faut "dépoussiérer" la religion !"
"Vous croyez qu’à l’époque de Moïse, ils avaient un évier et une vaisselle pour la viande et d’ autres pour le lait"
"Montrez-moi la ligne qui dit que les femmes ne doivent pas lire la Thora !"
Je ne veux pas impatienter votre correspondant par mes citations ; mais nos jeunes ne se reconnaissent plus au XXIème siècle dans ce que les sages  
des millénaires précédants leur "imposent".
Sans vouloir rentrer en conflit avec quiconque, je voudrais juste poser une question de sexagénaire "bien dans ses baskets" :
Le temps n’ést-il pas venu d’opérer quelques modifications ?
Que l’on se rassure : je n’y prendrais pas part !
Il ne manque pas de Rabbins   érudits qui pourraient s’en charger. Je crois qu’il y a URGENCE, notre jeunesse se perd, elle fuit ce qui est trop contraignant !
N’oublions pas, nous sommes à l’ère des recherches dans l’espace et d’Internet !
C.Busidan

Les rabbins orthodoxes sont-ils les seuls garants de l’avenir du peuple juif ?

J’ai lu l’article ainsi que ses réactions : on parle de la place de la femme, de supériorité, de la perte de la jeunesse, de conversion. Des sujets très intéressants et à polémique certes mais qui ne répondent pas à la question posée et qui souvent sont écrits sur le vif sans être objectifs. Mettons nos préjugés de côtés !
Je vais tenter d’y apporter ma réflexion tout en réagissant aux propos du rabbin   Yeshaya Dalsace.
Je pense que l’intérêt de la question « les rabbins   orthodoxes   sont-ils garants de l’avenir du peuple juif ? » réside tout simplement dans son présupposé que l’avenir du judaïsme ne repose en fait que sur un seul mode de pratique et de vision du judaïsme, une seule façon de comprendre la substance des textes et de se sentir juif et ce, si je reprends la question, cette façon serait l’orthodoxie  . Posée comme ça il est évident que le judaisme ne repose pas que sur un seul mouvement. A mon sens, on peut retourner la question : « le mouvement Massorti   est-il le seul garant de l’avenir du peuple juif ? ». Pour la question est la même et la réponse me semble évidente : on parle d’unité du peuple juif mais il ne faut pas confondre unité et conformisme. Le peuple juif ce n’est pas que l’orthodoxie   ou le mouvement Massorti  , le peuple juif se construit à travers plusieurs mouvements tous très différents les uns des autres et c’est ce qui fait sa richesse dans la mesure où chacun de ses mouvements est prêt à débattre et communiquer avec l’autre et surtout accepter l’autre dans ses divergences. Et c’est bien là le problème quand je lis l’article de M.Dalsace où j’ai l’impression de lire un pamphlet anti-orthodoxe   :« Ce qu’en pense la frange radicale et fondamentaliste du judaïsme doit être le cadet de ses soucis. « Le chien aboie et la caravane passe » dit le proverbe. ». Même si l’argumentation de votre article reste justifiée et à propos, en venir à dire ça à la fin de l’article me semble déplacé. Je dirais même qu’on emprunte les chemins de l’orthodoxie   et qu’on commence soi-même à devenir radical en reniant l’autre ! Au contraire, ce que pensent les orthodoxes   me concerne autant moi non orthodoxe   mais juive et soucieuse de comprendre ce qui pose problème actuellement dans l’unité du peuple juif. Comme nous l’a expliqués le rabbin   Rivon Kriger, un arc ciel c’est 7 couleurs ni une ni moins. Je n’imagine pas le judaïsme sans orthodoxes   et sans conservateurs.(et bien d’autres mouvements encore). Je pense que ces mouvements doivent contribuer à l’équilibre et l’évolution du peuple juif de par leurs divergences et confrontation. L’avenir du peuple juif réside en la capacité de chacun à accepter l’autre dans sa différence, être prêt à se remettre en question et ne pas oublier que nous sommes issus du même peuple.
Je comprends bien sur comme cela peut être bien difficile pour une personne qui a une profonde connaissance de la Torah, de devoir se remettre en question et accepter parfois que d’autres chemins de réflexion existent mais là est un autre débat…

Les rabbins orthodoxes sont-ils les seuls garants de l’avenir du peuple juif ?

Mlle Gherson votre reflexion est tres interressante et je vous remercie pour avoir eclaire le debat d une si brillante maniere.
En esperant vous lire prochainement,

Bien a vous.

Réponse de l’auteur de l’article à Débora

Merci Déborah pour ces remarques stimulantes auxquelles j’adhère en grande partie.

Il semble que je me sois mal exprimé car je n’ai jamais dans cet article nié la légitimité de l’orthodoxie  , ni ses qualités et ses avantages. L’orthodoxie   est totalement légitime, elle apporte un grand dynamisme dans le domaine de l’étude, de la pratique et de la démographie. Elle comporte des figures tout à fait intéressantes (je suis actuellement plongé dans les œuvres passionnantes d’un rabbin   ultra orthodoxe   contemporain « admour » d’une toute petite cours hassidique en Israël). Jamais dans cet article je n’ai nié les qualités de l’orthodoxie  . J’ai simplement expliqué que l’orthodoxie   ne détient pas le monopole de la vérité et du judaïsme et que le bilan historique de l’orthodoxie   stricte n’a rien de bien positif pour prétendre à être le seul garant de l’avenir du peuple juif, ce qu’elle ne cesse de faire, dans la question même de l’internaute. La seule chose que j’ai dénigrée est la volonté d’empêcher les autres d’exister comme je vais l’expliquer plus en détail ci-dessous.

La question « le mouvement Massorti   est-il le seul garant de l’avenir du peuple juif ? » serait en effet intéressante mais n’a pas été posée et ne saurait vraiment l’être car le mouvement Massorti   ne se voit nullement comme une exclusive mais comme une des couleurs d’une large palette. Nous n’avons jamais prétendu à aucun monopole et n’avons jamais rejeté le dialogue et la concertation avec d’autres tendances (orthodoxes  , libérales ou séculaires). Un des axiomes de la pensée du mouvement Massorti   (divisé parfois en tendances internes opposées) est l’idée de pluralisme et que la révélation est par nature multiple, tout comme la vérité. Pour nous le judaïsme ressemble à un être vivant qui non seulement comportent toutes sortes d’organes, tous indispensables mais de plus est, et a toujours été, en constante évolution.

Il est vrai que mon article est sévère avec le fondamentalisme juif, sans pour autant être méprisant. Il y a pour cela de bonnes raisons.

• Dans la question de cet internaute était contenu implicitement l’idée que « hors de l’orthodoxie   point de salut », que seuls les orthodoxes   sont de véritables rabbins  , que seule l’orthodoxie   à légitimité pour discuter de Halakha  , que la rigueur et l’immobilisme ont de tout temps conservé le peuple juif dont le destin ne dépendrait que des seuls rabbins  . Je ne sais ce que pense exactement cet internaute, mais je connais trop bien ce genre d’arguments pour les avoir entendu de nombreuses fois. Tout cela relève de véritables clichés, ainsi que d’erreurs historiques profondes, hélas assez répandus, et qu’il faut arriver à briser.

• De plus, je fais clairement la distinction entre deux formes d’orthodoxie  . La moderne qui accepte le dialogue tout en campant sur des positions très conservatrices mais en tenant compte de l’ensemble des paramètres, à commencer par la position Massorti  , l’orthodoxie   moderne n’est nullement visée par cet article. L’orthodoxie   fondamentaliste, enfin, qui refuse le débat, considère toute opinion contraire à la sienne comme illégitime, exploite sa position de force dans certains pays pour établir une censure systématique et une ambiance inquisitoriale afin de tenter de faire taire toute voix susceptible de remettre en cause sa position. C’est le cas dans les pays européens et en Israël. Quand on prend conscience de la réalité sur le terrain, les positions sont totalement inégales et celui qui est attaché à des valeurs de pluralisme, de dialogue, de liberté de pensée et de modernité, doit s’armer de patience et d’énergie afin de mener un combat pied à pied pour la survie des valeurs auxquelles il est attaché. Il ne s’agit pas ici de manque de respect, mais de lucidité afin de permettre à un judaïsme ouvert d’exister. C’est pourquoi le proverbe populaire : « Le chien aboie et la caravane passe », n’est, hélas, pas trop fort. Cela ne veut pas dire que dans les positions du fondamentalisme juif il n’y a pas une part de vérité et un discours ou des actions éminemment respectables et efficaces ; il y en a même beaucoup et nous les respectons. Mais cela veut dire, que la prétention à l’exclusivité, la prétention d’incarner la seule possibilité de survie et d’être la voix rabbinique qui aurait toujours eu raison, la volonté de tout faire pour empêcher l’existence d’autres courants d’émerger, l’idée que le Judaïsme serait figé dans le temps et donc tout faire pour empêcher toute évolution sur des questions brûlantes dans le judaïsme (la position de la femme n’en étant qu’une parmi d’autres), quitte pour cela à humilier, censurer, boycotter… doit être combattu avec fermeté, pour peu que l’on adhère à une certaine dimension de la dignité humaine et de la liberté. Hélas, rares sont les gens pour qui la liberté et la dignité sont des valeurs suffisantes pour qu’on se mobilise. C’est vrai chez les peuples, cela l’est également, hélas, au sein du judaïsme.

• Mon discours n’a de pertinence que si on se rend compte de la réalité de ce que représente le fondamentalisme juif. Si on regarde ce fondamentalisme comme une position parmi d’autres, tenue souvent par des gens tout à fait sympathiques au premier abord, détenteur de surcroît de la figure du « juif authentique », mes propos perdent tout leur sens et sont ceux d’un imbécile intolérant. Le problème, c’est que mes propos sont tenus dans un certain contexte, qui a de quoi faire dresser les cheveux sur la tête de toute personne attachée à la défense d’un judaïsme moderne et pluriel. Partout dans le monde, où le fondamentalisme juif à une position de force, il exploite cette position pour imposer ses vues et faire taire celle des autres par la force. Voici juste quelques exemples mais la liste serait trop longue.

En Israël, le rabbinat orthodoxe   règne en maître sur toutes les affaires religieuses du pays et sur un budget de fonds publics colossal. Les institutions qui ne relèvent pas de son idéologie sont systématiquement censurées et doivent se financer par des fonds privés. Par exemple, un rabbin   orthodoxe   d’une localité reçoit son salaire de fonds publics, un rabbin   non orthodoxe   recevra son salaire de fonds privés ; quels que soient le caractère et les opinions religieuses de la population de cette localité. Le rabbinat orthodoxe   interdit l’usage des Mikvaot, (bains rituels) par les courants non orthodoxes   afin de les empêcher de fonctionner normalement. Le problème est que ces Mikvaot, qui coûtent très cher, sont tous construits et entretenus avec des fonds publics. Il en est de même pour les cimetières où il est très difficile pour un rabbin   non orthodoxe   de pouvoir officier. Les courants non orthodoxes  , voire même orthodoxes   modernes mais déjà sur la sellette du rabbinat, comme c’est le cas du célèbre rabbin   David Hartman, doivent se battre bec et ongle pour trouver les moyens de leur existence. Toute personne quelque peu attachée à l’esprit public ne peut trouver cela que scandaleux. Une des raisons pour lesquelles les partis politiques orthodoxes   sont fermement opposés au vote d’une constitution en Israël, c’est que cette constitution mettrait fin à leur monopole. En Israël, le monopole religieux orthodoxe   est une véritable honte pour la démocratie israélienne. Le système est corrompu, coûteux, inefficace et surtout en décalage avec le reste de la société et les aspirations des Israéliens à vivre dans un État moderne au plein sens du terme et dans une véritable démocratie.

Exemple douloureux que je connais : le Grand rabbin   d’un quartier de Jérusalem apprenant que quelqu’un étudie au séminaire Massorti   interdit au frère orthodoxe   de cette personne de boire même un verre d’eau chez son frère considéré comme « renégat » ! A la suite de quoi la femme très ouverte d’esprit de l’orthodoxe   fit une tentative de suicide…

En Angleterre, un groupe de familles d’une ville de province s’est intéressé au mouvement Massorti   (très prospère à Londres), ils ont décidé d’organiser une réunion d’information. Le rabbin   local a fait pression avec succès en menaçant la famille organisatrice pour faire annuler cette réunion (privée !). Six mois plus tard, une autre réunion a été néanmoins organisée, le rabbin   local est venu se poster devant la maison avec une feuille de papier pour noter le nom de tous les participants ! Ceci n’est qu’un petit exemple des innombrables vexations que doivent subir les non orthodoxes   dans ce pays. L’affaire Louis Jacobs restant célèbre et ayant suscité de nombreux articles.

En France, la situation est encore pire qu’en Angleterre à cause de la construction napoléonienne du consistoire   qui a théoriquement la mainmise sur tout le judaïsme. On assiste à une censure systématique et des attaques dénigrantes incessantes en ne se privant pas pour raconter absolument n’importe quoi. A Nice où je suis rabbin  , la communauté Massorti   forte de près de 150 familles (troisième synagogue en importance de la ville) est totalement censurée de radio juive, celle-ci dépendant du consistoire  , aucune annonce ou émission n’est possible ; elle n’est pas indiquée dans la liste des communautés non consistoriales du calendrier du rabbinat ; comme rabbin   on a cherché (en vain car illégal en France) pour m’interdire d’officier au cimetière malgré la demande des familles ; aucun affichage ne nous est autorisé dans un magasin cachère (pression sur le propriétaire) ; à Marseille ont interdit à un traiteur kasher   de livrer de la nourriture à la communauté libérale… La liste est encore très longue.

Sur le fond, il est très difficile d’organiser un colloque ou une table ronde pour discuter des grandes questions du judaïsme qui nous intéresse avec la présence d’un rabbin   orthodoxe   sans que celui-ci ne subisse de fortes pressions ou refuse simplement de venir. Même des organismes théoriquement neutres, (FSJU, Bnei Brith,…) subissent des pressions pour maintenir les non orthodoxes   à l’index, et ce qui est plus grave, en tiennent parfois compte (une loge Bnei Brit a cédé à la pression d’une petite partie de ses membres oubliant totalement l’idéal de ladite organisation afin de cesser de se réunir dans nos locaux !).

Nos positions aussi bien sur la Halakha   que le reste sont systématiquement dénigrées sans pour autant être étudiées sérieusement.

Dans un tel climat qui a de quoi déranger profondément et révolter toute personne attachée à des valeurs de dialogue et de démocratie, il est logique qu’on se permette d’exprimer des positions autres, notamment sur le web où nulle censure n’est possible.

C’est donc dans un tel climat que je me permets d’employer certains termes un peu durs. En fait, je pourrais l’être beaucoup plus.

Pour en revenir au fond du sujet, la question qui est posée est celle-ci : dans le contexte moderne, l’orthodoxie  , qui est le seul mouvement qui prétend à l’exclusive, a-t-elle le monopole des solutions ? Faut-il attendre le bon vouloir de rabbins   orthodoxes   pour améliorer la position de la femme ? Faut-il fermer toutes les synagogues (des milliers de par le monde) qui ne correspondent pas à la norme orthodoxe   afin d’assurer la pérennité du peuple juif car seul les décisionnaires orthodoxes   seraient à même de le faire ? Faut-il fermer les séminaires rabbiniques non orthodoxes   afin de n’avoir que des rabbins   vraiment capables d’assurer l’avenir du peuple juif ?
Ou bien au contraire, faut-il se réjouir de la montée en puissance d’alternatives afin d’avoir les moyens d’établir un véritable choix et de proposer des solutions viables à des quantités de juifs qui en ont besoin ? Ne peut-on pas rêver d’une communauté juive française vraiment plurielle dans laquelle les gens seraient libres de choisir le judaïsme qui leur plaît en toute connaissance de cause sans risque d’être mis à l’index par qui que ce soit ?

Actuellement, l’alternative ne peut exister que si des gens s’organisent courageusement et acceptent de déployer une énorme énergie pour fonder des communautés avec l’état d’esprit ouvert qui leur convient. Cela demande une véritable vision de l’avenir et une passion pour la juste cause d’un judaïsme moderne. Cela demande également la capacité d’affronter sans se laisser impressionner les pressions de toutes sortes. C’est seulement ainsi que la « caravane » peut passer.

Si en France, depuis quelques années, des gens courageux et remarquables ne s’étaient pas organisés pour créer des communautés alternatives, le monopole orthodoxe   serait absolu. Plus les communautés alternatives prendront de l’ampleur, plus les valeurs qu’elles défendent pourront être défendues et mieux ce sera pour l’avenir du Judaïsme. Il en est de même dans le reste de l’Europe et dans l’État d’Israël.

Je pense personnellement très sincèrement, que si la caravane de la modernité ne peut pas passer, alors le judaïsme deviendrait pour la plupart des juifs une religion du passé mais en aucun cas celle de leur avenir. Ce serait pour l’histoire juive une catastrophe sans précédent car provoquée de l’intérieur. Hélas, cela ne se peut faire que grâce à des militants et à une lutte acharnée pour mettre en place des structures modernes et tolérantes. Je suis tout à fait optimiste. Les énormes succès que nous avons un peu partout montrent que nous allons dans le bon sens. Mais quelle énergie perdue à chercher à démontrer son droit l’existence, (à commencer par cet article qui ne devrait même pas être nécessaire), au lieu de dépenser cette énergie à des choses autrement plus utiles pour le large public.

Pour ce qui est des communautés orthodoxes  , personne ne les empêche d’exister ni cherche à les brimer. Aux Etats-Unis, où les courants non orthodoxes   sont l’immense majorité et détiennent dans leurs mains les instruments du pouvoir communautaire, les communautés orthodoxes   sont libres de prospérer, mais sur la seule force de la conviction jamais de l’oppression ou de l’ostracisme. C’est ce que je souhaite pour le reste du monde juif.

Très cordialement

Yeshaya Dalsace Webmaster et rabbin   à Nice

Réponse de l’auteur de l’article à Débora

Bonjour à tous.

Les rabbins   orthodoxes   sont-ils les seuls garants de l’avenir du peuple juif (...)

1. Je pense que la question est mal posé. L’orthodoxie   n’a rien à faire avec les rabbins  . L’orthodoxie   est une idéologie qui « demande » à chaque juif l’accomplissement de la Tora et des mitsvot, neto. Cette Tora qui a été donnée à Moise au Sinaï est à chaque génération réorganisée et codifiée en fonction du besoin de la génération (attention, codifié, pas légiférer !

2. Je pense qu’il serait favorable non pas de parler d’hommes religieux « rabbin   ou non » (qui souvent ne représente que superficiellement le courrant auquel ils appartiennent) mais d’idéologie orthodoxe   ou non-orthodoxe  .

3. Dire que l’ideologie orthodoxe   n’est pas ouvert au débat est un non-sens. Toutes personnes ayants eu l’occasion de s’asseoir dans une Yechiva orthodoxe   et d’écouter deux talmudistes se « disputer » comprend que le débat est lui même le dynamisme de l’évolution.

4. Seulement, il y a les « règles du jeu ». vous vous dites ouvert à tous les débats et que c’est la, la richesse du peuple. Je pense que vous n’etes pas à la recherche d’une vérité puisque selon vous il peut y en avoir plusieurs ? Et chacun à le droit de croire à ce que bon lui semble (n’est ce pas ?) et c’est la, à mon avis, la majeur difference entre le courant orthodoxe  , qui cherche une seule vérité et qui accepte dans la mesure de la logique, d’autre idée que les sienne si ces dernières sont aussi le résultat de la recherche d’une unique vérité. Ce que l’on appelle « elou véélou divrei elokim haïm » . par contre, affirmer que « à chacun sa vérité (pirandello) » revient (excusez moi l’empreint) à l’idée de korah   « kol aeda koulam kedochim ».

5. Ce qui est vrai c’est que vous n’êtes pas dérangé par les autres courants du judaïsme, vous n’êtes pas dérangé par des juifs qui même selon vos critères ne respectent pas Dieu. vous n’êtes pas dérangé par le juif athée ou renégat. Le juif orthodoxe  , le vrai, (l’admour de slonim (Netivot chalom) par exemple) pleure dans chacune de ses prière pour ces pauvre juifs. Il ne supporte pas voir un de ses frères vivre tellement loin de la Tora et de la tous les efforts et investissements (des millions de dollars par mois) de « kirouv rehokim » qui n’existent que dans les courants orthodoxes  .

6. Dernières éléments, on ne peut exiger une discutions, que s’il y a un minimum de niveau commun entre les leaders des différents partis. Hors, au jour le jour, vous ne pouvez pas comparer le type des responsas du rabbin   Golinkin et celle des rabbanim qu’il ramène et rejette. Le rabbin   Golinkin a des connaissances, certes, et rédige très agréablement de façon souvent assez universitaire, tout à son honneur et son avantage. Mais la qualité de la responsa   est souvent douteuse ou légère (je doute que vous n’auriez pu faire de même !). Je m’etonne que vous en soyez dupe (si vous l’etes !) Avez-vous lu du Dibrot Moché (Feinstein   sur le talmud  ) c’est impressionnant, affolant, tourbillonant !!

7. Allez encore un dernier (pour finir sur une nôte plus douce). Le courant orthodoxe   (si ça existe…) on s’en fiche éperdument, c’est le peuple juif qui nous importe (pourquoi c’est un autre sujet). Des hommes et des femmes gâchent leur existence à cause des dits et non-dits de quelques imbeciles qui se disent representer l’orthodoxie  . Mais c’est souvent la haine gratuite qu’il représente (ou la naïveté). L’orthodoxie   appartient à tous et appartiendra à tous, (et ce n’est pas en montant un parti politique qu’on se l’approprie)

Qu’hachem nous aide à vivre comme un vrai juif dans l’accomplissement de ses mitsvot !
Amen  .

Bien à vous.
Professeur Tournesol

Réponse de l’auteur de l’article à Débora

J’ai lu votre article qui m’a profondement brisé. Je reprends vos phrase et les analyse. Je serai heureux derecevoir une réponse à mes remarques.

merci

vous ecrivez : Dans le contexte moderne, l’orthodoxie  , qui est le seul mouvement qui prétend à l’exclusive.

Il y a le comportement et l’idéologie. L’idéologie orthodoxe   est en France, en Israël ainsi qu’en Angleterre et en argentine (pour ma connaissance) l’idéologie reconnue et accepter par une majorité écrasante. C’est à Baba Salei, au rabbi de Loubavitch   et à Rav chah’ ou au Steipler que l’on demandait des bénédictions. Et je vous parle des juifs les plus éloigné de la Tora cela aussi sont idéologiquement orthodoxe   mais le yetser ara est dure à combattre pour tout le monde. Et si vous, vous ne croyez pas au pouvoir des bénédictions des tsadikim, vous devriez vous renseigner (pas comme un naïf qui croit à tout…) une minorité infime ont mis en place des idéologie « moderne » modern orthodoxe  , massorti  , libérale. reformé. Et attire, majoritairememt, des juifs « pomé » spirituellement, qui sont attiré par des discours soutenus qui cautionnent leur comportement

A t-elle le monopole des solutions ?

Qui parle de solutions ? nous sommes à la recherche d’une vérité, elle peut ne pas plaire à un couple marié qui côtoie les boites échangistes (bien qu’ils ont droit à être respecté) ni à une personne qui adore les moules frites. Les sommités rabbiniques nous montrent du doigt la cible, nous devons tendre vers elle, non pas l’atteindre !

Faut-il attendre le bon « vouloir » de rabbins   orthodoxes   pour améliorer la position de la femme ?

C’est « pas gentil   » de penser que les rabbins   donnent une position à la femme par « bon vouloir ».
A part cela je connai des femmes ultra-orthodoxe   dentistes d’autre magistrat, d’autre conferencière. Si pour des raison spiritualo-technique ces sommité rabbinique ne donne pas le droit à la femme d’officier ou exige une mehitsa. Ils ont des bonnes raisons, ne soyez pas naïf ! ne pensez-pas que c’est uniquement à travers la lecture des vieux textes que le psak   est créé !

Faut-il fermer toutes les synagogues (des milliers de par le monde) qui ne correspondent pas à la norme orthodoxe   afin d’assurer la pérennité du peuple juif ?

Ne vous inquiétez pas pour la pérennité du peuple juif, la n’est pas la question ! c’est pour la pérennité de vos familles (qui généralement au bout d’une génération chez les reformés et deux pour les libéraux s’évaporent dans la nature) que l’on s’inquiète !! et je suppose que vous en etes conscient

Et puis ces sommité rabbinique n’exigerai pas leur cloture. Il suffirait juste de les faire correspondre aux normes de la Halaha. Et biensur le rabbin   liberale aura priorité pour garder son poste de rabbin   !

Faut-il fermer les séminaires rabbiniques non orthodoxes   ?

Si l’on enseigne des theses qui ne corresponde pas à une recherche de vérité, oui ! je ne vois même pas la question ?

Ou bien au contraire, faut-il se réjouir de la montée en puissance d’alternatives afin d’avoir les moyens d’établir un véritable choix et de proposer des solutions viables à des quantités de juifs qui en ont besoin ?

Ce que vous cherchez, il me semble, c’est trouver un moyen de permettre au gens de faire ce qu’ils ont envie de faire. Ci cette personne vous soumet un problème trop gros (se marié avec un non-juif qui ne souhaite pas se convertir) vous le dirigerez (avec respect) vers les réformés (la, ils auront un choix véritable !!)

Ne peut-on pas rêver d’une communauté juive française vraiment plurielle.

La pluralité existe dans le milieu orthodoxe   mais pas la permissivité. Il y a des gens qui se lance dans des hautes études de médecine d’autre dans l’atome (à Nice il y a Pr Naon par exemple et ses enfant sont eux dans l’etude de la Tora plein temps) d’autre se plonge dans l’étude de la Tora (oui, l’élite du peuple) d’autre qui travaillent dans toutes les formes de professions possibles et inimaginables mais il y a une structure « imposé » oui imposé par la Tora ! Cette structure chez nous c’est notre bonheur, notre raison d’être, notre dynamisme (rt c’est pas facile on ne gagne pas toujours la guerre mais on reste à l’armée). Pour vous cette structure c’est le mur de fer auquel il « faut » coute que coute trouver des solutions.

Nous vivons dans la Tora et devons adapter le monde moderne à cette Tora. Vous vivez dans le monde moderne et devez adapter la Tora (qui ne l’est plus bien évidemment) au monde moderne.

les gens seraient libres de choisir le judaïsme qui leur plaît en toute connaissance de cause.
En connaissance de cause !? Vous surestimez la génération dans laquelle vous vous trouvez ! Il ne suffit pas d’être majeur dans le pays dans lequel vous vous trouvez pour ne pas tomber dans le panneau ! la preuve en est vous et moi sommes majeurs et je pense que vous êtes tombé dans le panneau autant que vous en pensez de moi (certainement) et tout les deux ne sommes pas des plus crédules ni des plus illettrés du peuple ?

Excusez ce ton un peu arrogant ce n’est pas le texte qui est important c’est le message qu’il contient. Dans l’espoir qu’une juive ou un juif (honneur aux femmes) retiennent une bribe du message.

Cordial chalom.

P.S. je serai heureux de recevoir des commentaires…

Réponse

Cher M.

Je ne pense pas que votre exposé mérite beaucoup de commentaires. Il exprime le point de vue orthodoxe   assez clairement.

La seule erreur que vous faites consiste à penser que les gens hors de l’orthodoxie   sont « paumés » ou « incultes en judaïsme »… ou encore cherchent la facilité et la permissivité à bon prix. C’est une vision caricaturale (comme l’idée de couple échangiste, fantasme qui regarde celui qui l’exprime).

La position sociale d’une femme orthodoxe   dans la vie civile n’est pas le sujet. Le problème se pose au sein du judaïsme, dans lequel cette même femme (diplômée et intelligente) se trouve réduite à un rôle subalterne. Mais peut-être que les choses sont très bien comme ça et que tout va bien.

Yeshaya Dalsace

La différence fondamentale

La différence fondamentale n’est pas le contenu idéologique, la doxa mais bien la manière d’agir, la praxis (et d’ailleurs le judaïsme est une religion orthopraxe, pas orthodoxe  ) : contrairement à beaucoup de rabbins   orthodoxes  , jamais un rabbin   masorti ne se permettra de :
 refuser de marier un Juif sous prétexte qu’il appartient à un courant différent.
 ne pas inviter un rabbin   dans sa synagogue sous prétexte qu’il n’est pas masorti (ex. tout récemment : le rabbin   orthodoxe   Marc-Alain Ouaknin à la synagogue masorti de Nice).
 interdire la présence de brochures d’autres courants (ex. dans cette même synagogue : le feuillet hebdomadaire du mouvement loubavitch   ; l’inverse est malheureusement impossible)
 juger qui est rabbin   et qui ne l’est pas ; supposer qu’un rabbin   ou tel ou tel Juif ne respecte pas la Torah sous prétexte qu’il appartient à un autre courant.
 dire par exemple à une femme juive ayant un enfant avec un non-Juif, et qui vient prendre conseil sur l’idendité religieuse de son enfant et notamment la possibilité d’une circoncision, qu’elle doit immédiatement quitter son mari ! - vu sur cheela... (parents séparés : super pour le gamin...ça va sûrement lui faire aimer le judaïsme !)
 refuser l’accès à une école juive à un enfant qui n’est pas juif halakhiquement, ou qui n’appartient pas au même courant (l’Ecole Juive Moderne de Paris co-fondée par le mouvement masorti accueille tous les enfants même les non-juifs et c’est tout à son honneur) ou même qui est juif halakhiquement, même selon les normes orthodoxes   comme cela est arrivé en Angleterre il y a quelques mois ! (il faut dire que le gosse avait commis le crime suprême : une de ses grands-mères n’était pas juive !)

etc...

bien sûr tous les orthodoxes   et tous les rabbins   orthodoxes   ne sont pas à mettre dans le même sac, heureusement ! Et il y a des idiots partout. Mais il y a des attitudes, des comportements, des abus de pouvoir d’autant plus inacceptables quand ils proviennent de personnes censées représenter le judaïsme "officiel"...

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