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La face cachée de Dieu

La face cachée de Dieu

Un signe de pardon...

« 16. La Transcendance a dit à Moïse : « Voici que tu vas te coucher avec tes pères, et ce peuple va se lever et se prostituer derrière des dieux étrangers à la terre au sein de laquelle il vient. Il m’abandonnera et violera mon alliance que j’ai coupé avec lui. 17. Ma colère s’enflammera contre lui en ce jour, je les abandonnerai et je cacherai ma face d’eux. Il sera pour manger, et de nombreux maux et malheurs lui arriveront. Ce jour-là, il dira : « N’est-ce pas parce que mon Dieu n’est pas en moi que ces maux me sont arrivés ? ». 18. Et moi, ce jour-là, cacher je cacherai ma face à propos de tout le mal qu’il a fait, car il s’est tourné vers d’autres dieux » (Deutéronome 31, 16-18).

L’interprétation habituelle de ces versets répond à un étonnement : comment Dieu va-t-il cacher doublement sa face au verset 18, alors qu’au verset précédent, Israël semble commencer à se repentir – faire techouvah – en reconnaissant que les malheurs qui lui sont arrivés sont liés à son éloignement de Dieu ? Réponse : parce qu’il ne s’agit pas d’un repentir complet, mais seulement de velléités de techouvah, et que cela ne saurait suffire dans le cas de l’idolâtrie – la pire des fautes dans le judaïsme qui consiste à confondre Dieu avec ce qui ne peut en être qu’une caricature, et à tuer ou se faire tuer pour une telle caricature…

Mais on trouve une autre interprétation dans le commentaire « Haktav vehaqabalah » du 19ème siècle : ce double cachement de la face divine ne viserait pas Israël, mais le mal qu’il a fait en se tournant vers les idoles. Autrement dit, parce que Dieu ne supporte pas l’idolâtrie qui dénature la relation à lui, il ne peut que détourner sa face, s’éloigner d’Israël qui s’est éloigné de lui. Mais lorsqu’Israël fait retour et commence seulement à regretter cet éloignement, alors Dieu cache doublement sa face face aux fautes d’Israël. Il fait ce que nous lui demandons de faire à Kipour : il recouvre nos fautes (kipour) et fait comme si elles n’avaient jamais existé. Et son amour est si fort, qu’il les recouvre deux fois, pour être sûr de ne plus les voir…

Et l’on peut aller plus loin avec cette interprétation. Car le début du texte nous rapporte que lorsque Moïse mourra, le peuple se lèvera et se prostituera. Or on aurait dû dire qu’il tombera et se prostituera à la suite d’autres dieux. Comment peut-il se lever – ce qui est positif – et faire une faute – ce qui est négatif ? On peut donc comprendre autrement : il se lèvera, parce qu’alors qu’il se prostituera et entrainera la colère et l’éloignement de Dieu, un jour il regrettera cela et fera retour vers Dieu. Il se lèvera, parce qu’il aura la force de se relever après la faute et de revenir vers la vocation qu’il avait voulu délaisser. La force de l’homme, ce n’est pas d’être parfait – qui le pourrait ? Comme le dit le verset, “il n’y a pas de juste sur la terre ... qui ne faute pas” (Qohelet 7, 20). La force de l’homme, c’est d’être critique, d’être capable de regretter ses manquements et de les utiliser pour se relever. Et c’est précisément alors que Dieu cachera doublement sa face : lorsque l’homme se lève pour faire retour vers lui, il se cache encore plus, pour lui laisser la place et l’initiative de son propre retour et de sa propre résurgence. L’absence de Dieu n’est plus alors négative : elle est la condition pour que l’homme s’élève à la plénitude de sa responsabilité – elle est un signe d’amour et de pardon.

Yedidiah Robberechts

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