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Jouer à cache-cache avec Dieu !

Jouer à cache-cache avec Dieu !

Parashat vayelekh -

Un jour, le fils du Rav Dov Ber de Mezeritch, le successeur du Baal Chem Tov, vint en pleurs se plaindre auprès de son père : "Je jouais à cache-cache avec mes amis, et je me suis tellement bien dissimulé qu’ils ont cessé de me chercher et sont partis ailleurs !".

Le "Maguid" de Mezeritch consola son fils en lui disant : "C’est sans doute ce que Dieu ressent, lorsqu’il nous dissimule l’aspect de sa divinité, à tel point que certains d’entre nous cessent de le chercher, et se mettent ainsi à vivre sans Dieu !".

Ce bel apologue hassidique me semble éclairer à sa façon l’un des passages les plus célèbres et les plus difficiles de notre section shabbatique. Au chapitre 31, Dieu révèle à Moïse qu’après sa mort, le peuple d’Israël abandonnera la voie juste pour suivre des dieux étrangers, renversant ainsi l’Alliance. La réaction divine est décrite aux versets 17 et 18 : "Je me mettrai en colère contre lui ce jour là, je les abandonnerai et je leur cacherai ma face, et ils seront une proie et ils auront nombre de maux et de malheurs, et il dira ce jour là : n’est-ce pas parce que Dieu ne se trouve pas en moi que j’ai subi toutes ces difficultés ?Et moi je cacherai ma face ce jour là du fait de tout le mal qu’il a fait, car il s’est tourné vers d’autres dieux".

Ce voilement de la face de Dieu est souvent interprété, de par le contexte de la Torah, comme l’abandon du peuple d’Israël en période de malheur, et Martin Buber, par exemple, l’a utilisé dans sa tentative de s’affronter théologiquement au terrible événement de la Shoah. Cependant, il me semble que le fait que la lecture de Vayelekh soit toujours liée à la période des dix jours redoutables, qui nous conduisent de Rosh   Hashana au jour de Kippour, nous oblige à comprendre ce passage également au niveau individuel, et pas seulement au niveau de l’histoire de la collectivité d’Israël.

La période des dix jours redoutables est une période d’examen de conscience, de "retour" (téshouva). Nous savons que Dieu siège sur son trône du jugement, et nous nous efforçons de nous repentir de nos actes afin qu’il ne nous voile pas sa face. Mais, si nous analysons sincèrement notre attitude, il y a une certaine forme d’hypocrisie dans cette course après les offices à la synagogue et les bonnes actions : qu’avons-nous donc fait pendant le reste de l’année ? N’avons-nous pas "joué à cache-cache" avec Dieu, oubliant sa présence et allant nous même vers d’autres voies ?

Dans le Talmud  , on nous raconte que les élèves de Rabbi Yochanan, peu avant sa mort, lui demandèrent de les bénir. Celui-ci leur répondit "que votre crainte du ciel soit au moins égale à votre crainte de Dieu". Lorsque les élèves s’étonnèrent en s’écriant qu’il fallait que la crainte de Dieu soit plus forte, le maître les rappela à la réalité, leur signalant que lorsqu’un homme s’apprête à commettre une faute, il se dit : "Pourvu que personne ne me voit !". N’est-ce pas ainsi que nous agissons tout au long de l’année ? Prenons un exemple trivial : si une voiture de police se trouve bien visible sur le bas-côté de l’autoroute, la peur du gendarme va nous faire lever le pied de l’accélérateur. Mais quelques kilomètres plus loin, nous reprenons notre course folle, bien au-delà de la vitesse autorisée. Or, ce faisant, nous transgressons l’Alliance que nous avons avec Dieu, qui nous interdit aussi bien de mettre en danger les autres que nous-mêmes ! Mais Dieu ne stationne pas sur le côté de la route avec son gyrophare allumé ! Il se dissimule dans chaque acte de la vie, et c’est à nous de le trouver en modifiant notre conduite (en l’occurrence au propre et au figuré !).

Dans le traité Rosh   Hashana, Rabbi Nathan affirme que Dieu nous juge à chaque heure qui passe. Mais contrairement à la période de Rosh   Hashana, où la solennité du culte nous fait entrevoir le trône du jugement, nous n’en avons pas conscience car, comme les camarades du fils du Maguid de Mezeritch, nous avons renoncé à le chercher, ne comprenant pas que cette dissimulation de Dieu n’est avant tout qu’une réaction à notre propre abandon de la voie juste. Et c’est pourquoi, en cette période de vœux et de souhaits, espérons que nous serons capable de nous remettre à la recherche de Dieu non seulement en cette période, à travers les belles cérémonies de nos synagogues, mais quotidiennement, à travers les petits actes de la vie où il ne tient qu’à nous pour que Dieu nous dévoile sa face.

Rabbin   Alain Michel – Rabbin   Massorti   à Jérusalem et historien

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