Couvre-chef des femmes

Pourquoi les femmes juives religieuses se couvrent la tête ? -

Quelle est la position Massorti sur le devoir pour une femme de couvrir ses cheveux ? (Un internaute)

Quelle est la position Massorti sur le devoir pour une femme de couvrir ses cheveux ? (Un internaute)

Notre réponse

Dans la tradition juive une femme est censée se couvrir la tête en public. Certaines le font scrupuleusement, ne laissant dépasser aucun cheveu, d’autres laissent sortir quelques mèches, d’autres encore, bien que pratiquantes, ont laissé tomber le foulard, le chapeau et a fortiori la perruque et laissent leur cheveux libres. La pratique actuelle est donc très variable.

Sociologiquement, la façon de se couvrir la tête ou pas est révélatrice du milieu juif auquel on appartient. Dans les milieux orthodoxes la pression sociale pousse les femmes à se plier à la norme en vigueur dans leur groupe avec toutes sortes de variantes selon les milieux. L’originalité et la fantaisie restent mal vues, l’essentiel étant de paraitre comme une femme exemplaire afin de défendre l’honneur familial. Dans les milieux plus modernes, ces contraintes sociales existent beaucoup moins, voire pas du tout, et chaque femme est libre de se coiffer à sa guise, tête couverte ou non.

Se couvrir les cheveux est une tradition très ancienne, noble et respectable. Mais ne fait-elle pas partie d’un ensemble de mesures de pudeur d’une société patriarcale, excluant les femmes du domaine public : interdit ou limitation de sortie, interdit de chant, de danses devant des hommes (ou avec des hommes), de prendre la parole en public, etc. La plupart de ces mesures sont ressenties comme humiliantes et aliénantes par les femmes d’aujourd’hui. Elles servent souvent de prétexte pour obliger les femmes à garder un rang secondaire derrière celui des hommes.

On peut trouver des arguments pour défendre ces mesures de pudeur. Notamment, le contre-exemple du laisser-aller de certains milieux occidentaux. Cependant, on ne peut nier qu’imposer à des femmes des mesures de pudeur contraignantes et décalées par rapport à leur mode de vie et leur mentalité, alors qu’on ne demande rien de semblable aux hommes, reste difficile à justifier.

Le but des femmes qui ne portent pas le couvre-chef n’est pas la provocation ou l’impudeur mais de se sentir mieux acceptées en tant que femmes dans le domaine public, sans avoir le sentiment de devoir se réprimer outre-mesure, dans un environnement où il est devenu habituel que les femmes soient tête découverte.

Il est évident que les mesures de pudeur sont relatives au milieu dans lequel on évolue.

Une pudeur dans la coiffure est toutefois requise comme pour toute autre partie du corps y compris couverte. C’est pourquoi il est louable qu’une femme décide de se coiffer dignement en cherchant à respecter les grands principes de la pudeur juive « tseniout », notamment à la synagogue. Pour autant, si longtemps les femmes ont mis un couvre chef ou un tissus dans les synagogues du courant massorti, cette pratique tombe en désuétude et ne saurait être une contrainte dans les milieux modernistes où plus personne n’attache grande importance à cette règle.

Les femmes qui désirent travailler sur cette question et adopter une attitude à la fois pudique et traditionnelle devront donc choisir le moyen de se couvrir la tête sans pour autant que cela soit pour elle une marque d’humiliation et de soumission. Une mesure intermédiaire consiste à se nouer simplement les cheveux. Des quantités de femmes juives modernes le fond et expriment même parfois une grande créativité dans le choix de leur couvre-chef ou coiffure.

Pour nous, Massorti, le point de vue absolutiste (mais en réalité fruit d’un certain environnement) interdisant à un homme de pratiquer toute prière en présence d’une femme à la tête découverte, n’est plus pertinent. Personne de nos jours et dans nos sociétés n’est sérieusement troublé ou choqué par une femme aux cheveux apparents.

Historique :

Pour mieux comprendre cette question étudions l’histoire de ce principe.

Dans la Bible, déjà, on constate que l’usage correct pour une femme est d’avoir les cheveux noués ou couverts.

Nombres 5.18
« Le Cohen fera tenir la femme debout devant l’Éternel ; il découvrira la tête de la femme, et lui posera sur les mains l’offrande de souvenir, l’offrande de jalousie ; le sacrificateur aura dans sa main les eaux amères qui apportent la malédiction. »

Il semble même que certaines femmes se voilaient totalement. C’est ce qu’il ressort de la rencontre entre Isaac et Rébecca.

Genèse 24.64-65
« Rebecca leva aussi les yeux, vit Isaac, et descendit de son chameau. Elle dit au serviteur : Qui est cet homme, qui vient dans les champs à notre rencontre ? Et le serviteur répondit : C’est mon seigneur. Alors elle prit son voile, et se couvrit. »

Ou encore de l’incapacité de Yehouda à reconnaître Tamar sa bru (et pour le coup, le fait d’avoir le visage couvert était lié à la prostitution) :
Genèse 38.15
« Juda la vit, et la prit pour une prostituée, parce qu’elle avait couvert son visage. »

Selon Paul qui était juif et vivait au 1er siècle, le port du voile est un signe de soumission à son mari :

« Le chef de tout homme, c’est le Christ, le chef de la femme s’est l’homme […] Toute femme, au contraire, qui prie ou qui prophétise, la tête non voilée, déshonore son chef… Si donc une femme ne met pas de voile, alors qu’elle se coupe les cheveux. Or, s’il est honteux pour une femme d’avoir les cheveux coupés ou d’être rasée, qu’elle se voile. […] L’homme lui ne doit pas se couvrir la tête, parce qu’il est l’image et la gloire de Dieu ; quant à la femme, elle est la gloire de l’homme. Ce n’est pas l’homme en effet qui a été tiré de la femme, mais la femme de l’homme ; et ce n’est pas l’homme bien sûr qui a été créé pour la femme mais la femme pour l’homme. Jugez-en vous-mêmes : est-il convenable qu’une femme prie Dieu sans être voilée ? La nature elle-même ne vous enseigne-t-elle pas que c’est une honte pour l’homme de porter de longs cheveux, mais que c’est une gloire pour la femme d’en porter, parce que la chevelure lui a été donnée comme voile ? » (I Corinthiens 11:3-15)

Ce témoignage des écrits pauliniens est édifiant sur la pratique juive de l’époque et sur la position des femmes.

A l’époque talmudique, il semble bien que cet usage de se couvrir chez certaines femmes pieuses était toujours en vigueur. Une anecdote édifiante nous est racontée dans la Guemara : Une femme, nommée Kim‘hith, a eu sept fils, et tous ont été élevés à la dignité de Cohen gadol. Les Sages lui ont demandé : « Qu’as-tu fait pour mériter une telle faveur ? » Elle a répondu : « Jamais, de toute ma vie, les poutres de ma maison n’ont vu le moindre de mes cheveux » (TB Yoma 47a). On remarquera l’ambiguïté de ce texte, car le fait que ses sept fils aient été à un poste réservé à un seul homme, semble montrer qu’ils sont tous morts les uns après les autres !

D’après la Michna (Ketubot. 7.6) : « Voici celles qu’on peut répudier sans restituer le douaire (ketouba) : celle qui transgresse la loi de Moïse ou les mœurs juives. De quelles lois mosaïques s’agit-il ? Si elle donne à son mari des aliments défendus pour défaut de dîme, ou si elle le trompe sur l’époque des menstrues, ou si elle ne fait pas son devoir en ce qui se rapporte à la Hallah (Nb 15, 20), ou si elle a fait des vœux et qu’elle ne les accomplisse pas. Quelles sont les infractions aux mœurs juives dont il est question ici ? Marcher tête nue au dehors, ou filer dans la rue (dans une attitude inconvenante), ou parler avec tout le monde (en plaisantant avec des jeunes gens). Aba Saül dit : Si elle maudit les parents de son mari en sa présence. R. Tarfon ajoute : Si elle est criarde ; et l’on entend par là celle qui parlant dans sa maison élève tant la voix que des voisins l’entendent chez eux. »

La guemara (TJ) ajoute :

« Selon Rav, c’est la femme que l’on entend d’un lit à l’autre (d’une autre pièce) dans ses relations conjugales. »

"Marcher tête nue", est-il dit, est interdit même dans la cour, et il va sans dire dans une ruelle (commune à plusieurs maisons). R. Hiya dit au nom de R. Yohanan : la femme qui est en capuche (capitium) n’est pas considérée comme marchant tête nue, si elle est dans la cour ; mais si elle est dans cet état dans une ruelle, elle est coupable du fait de marcher tête nue au dehors. »

Dans ce texte, on constate la gravité pour une femme de se promener tête nue puisqu’une femme qui ne s’y conforme pas perd ses droits à sa ketouba et peut être répudiée par son mari sans dédommagement (c’est toujours l’opinion du très conservateur rav Eliachiv (1910-2012) plus grande autorité orthodoxe ashkénaze).

Or il est évident à la lecture de ce texte que cela relève plus des mœurs et de la mentalité de l’époque que de l’essence du judaïsme. Cela même si l’expression « loi de Moïse ou les mœurs juives » laisse entendre le contraire, mais pour les chercheurs en Talmud ce genre d’expressions est justement lié aux mœurs du temps et à la volonté des rabbins de les faire appliquer.

Le grand code de la loi juive datant du XVIe siècle le Shoul‘han ‘aroukh (Evène Ha‘ézèr 115, 1 à 4), reprendra à son compte ce principe de pouvoir répudier sa femme sans dédommagement au prétexte qu’elle ne se couvre pas la tête. Si vraiment on voulait l’appliquer de nos jours, la plupart des femmes juives pourraient être répudiées sans autre forme de procès ! C’est pourquoi, et cela depuis longtemps la plupart des décisionnaires considèrent que cette halakha n’est plus de mise aujourd’hui, étant donné que la plupart des femmes qui ne se couvrent pas la tête agissent ainsi par pure ignorance (voir Igueroth Moché, Evène Ha‘ézèr 1, 114). Comme quoi, même les décisionnaires les plus orthodoxes adaptent la Halakha aux mœurs et à la mentalité du temps.

Le même code de lois (Shoul‘han ‘aroukh O.H 91.3) rapporte l’opinion suivante : « certains prétendent qu’il est interdit de faire une bénédiction la tête découverte, d’autres affirment qu’il faut s’abstenir d’entrer dans une synagogue la tête découverte ». On constate que cette opinion minoritaire au départ est entrée dans les mœurs pour les hommes. Théoriquement elle est également applicable aux femmes.

En ce qui concerne les femmes et les mesures de pudeur, il y a dans le Talmud (Brakhot 24a) un texte édifiant. Des rabbins discutent entre eux de savoir quelle partie du corps de la femme relèvent de l’impudicité (c’est-à-dire qu’il ne faut pas le regarder et qu’en sa présence il est interdit de prier car il est susceptible d’éveiller des pensées érotiques). Pour l’un, la moindre partie du corps est impudique ! L’autre (Rav Sheshet) ajoute que regarder, ne serait-ce que le petit doigt d’une femme c’est comme regarder son sexe ! (avec concupiscence ajouteront les commentateurs qui cherchent à restreindre l’interdit). Un autre considère que voir une cuisse est impudique. Un autre (Samuel) affirme qu’entendre sa voix est impudique. Enfin, celui qui interdisait le petit doigt ajouta à la liste déjà longue, les cheveux.

Il est intéressant de noter que c’est sur ce court passage, discussions d’hommes sur les femmes, que repose l’interdiction célèbre de chanter en public pour une femme qui pose tant de problèmes aujourd’hui dans certains milieux juifs orthodoxes.

Il faut enfin ajouter que les deux opinions les plus strictes (sur le cheveu et sur la voix) reposent sur le fait que le Cantique des cantiques nomme ces parties du corps dans un contexte érotique. Le problème est que le Cantique des cantiques en cite bien d’autres et que donc selon la logique talmudique, on pourrait bien allonger la liste des interdits en se reposant sur le même raisonnement. Le problème est qu’il faudrait alors cacher non seulement les cheveux, mais également les yeux, les dents (une femme ne devrait donc pas sourire), la bouche, etc.

On voit que la Bourka (le voile intégral cher aux talibans) a failli être une invention juive ! Mais justement, elle ne l’a pas été et ce n’est donc pas pour rien, cela montre bien que les rabbins, même les plus puritains, ont toujours eu conscience des limites de ces exigences.
Vu la mentalité rigoriste à l’extrême de certaines communautés juives orthodoxes aujourd’hui, on pourrait cependant bien l’adopter comme le font déjà de tous petits cercles fondamentalistes en Israël (comme la secte juive de Beit Shemesh surnommée par les journalistes : les « Talibans »).

La perruque chez les femmes juives :

Bien que le port de la perruque soit signalé dans le Talmud, la pratique très courante aujourd’hui dans les milieux orthodoxes de couvrir ses vrais cheveux par une perruque chez les femmes mariées est apparue en Europe au 18e siècle. La perruque était alors à la mode et les Juifs ont toujours suivit les modes vestimentaires et se sont vêtus comme leurs voisins, même si c’est devenu la norme dans les milieux ultra-orthodoxes de se distinguer de nos jours par des habits différents (pratique essentiellement masculine d’ailleurs). On appelle cette perruque « sheytel » en yiddish.

Il faut comprendre que l’un des buts du couvre-chef pour les femmes, outre de cacher ses cheveux est d’affirmer son statut de femme mariée, donc non-disponible. Cela peut être fait de façon élégante (il n’y a pas d’interdit à être belle dans le judaïsme, au contraire une femme doit être séduisante pour son mari et réciproquement), mais la perruque peut vite prêter à confusion.

Adopter la perruque était une façon de se couvrir la tête sans se faire remarquer. Cette pratique nouvelle à l’époque suscita la critique de nombreux rabbins qui y voyaient un compromis.

Le Hatam Sofer (1762-1839) s’est fermement opposé à la perruque. Rabbi Hayim Halberstam (1793-1876) auteur du Divré Hayim la qualifie d’objet de débauche (sic) et disqualifie toute femme s’adonnant à cette nouvelle mode qu’il fustige comme pratique « hérétique ». Rabbi Hayim Berlin (1832-1912), le fils du Natsiv de Valojyn, peu scrupuleux sur la question de se couvrir rigoureusement la tête, dit que le foulard vaut mieux que la perruque. Mais vox populi vox dei, la pression féminine et la force de la mode l’emportèrent sur les opinions rabbiniques et la coutume se répandit largement dans les rangs de l’orthodoxie jusqu’à devenir un signe distinctif de certains milieux… Il est même très mal vu de nos jours de ne pas porter perruque au profit d’un chapeau ou d’un foulard chez certains orthodoxes pour qui la perruque est comme une marque de fabrique.

Le marché de la perruque est devenu lucratif et nombreuses sont les femmes dans le monde à porter de belles perruques pour diverses raisons. Les femmes juives orthodoxes ne sont qu’une partie de ce vaste marché. Une belle perruque en véritables cheveux peut valoir très cher, de 500 à 1000€ et plus.

La question est de savoir d’où viennent les cheveux utilisés ? Face à la demande en constante croissance du fait de la mode, on assiste à un véritable trafic de cheveux à travers le monde. Les cheveux blonds et blancs valant plus cher et les textures européennes (plus fines) également car plus recherchés. Les cheveux viennent de toutes sortes de sources et un véritable marché international du cheveu s’est mis en place. La principale source est l’Inde, d’une part parce que les pauvres vendent ce qu’ils peuvent et d’autre part parce qu’un rite indou demande qu’on rase sa tête en hommage à une divinité. Les cheveux de ce culte, détruits à l’origine, sont devenus une source de profit pour les temples de ce culte qui revendent les cheveux en quantités gigantesques.

Quand les rabbins se sont rendu compte de ce fait dans les années 2000, cela a été l’affolement : les femmes orthodoxes portaient sur la tête une parure issue d’un culte idolâtre ! Or tout profit, même indirect, du culte idolâtre est interdit…Il fallait donc détruire de telles perruques…

Face à ce nouveau problème, plutôt que d’interdire la très contestable perruque, trop entrée dans les mœurs, on s’est mis à donner des certificats de kashrout aux perruques, certifiées sans cheveux d’Inde…ou de cheveux coupés pour de seules raisons économiques.
Or en la matière, les trafics sont faciles et le contrôle des plus douteux.

S’ajoute à cette question, celle de la trop grande ressemblance de la perruque de grande qualité avec des cheveux naturels. Le profit de la perruque (montrer son statut de femme mariée) serait nul ! C’est pourquoi des rabbins prônent des perruques visibles et interdisent de masquer le bord de la perruque par un bandeau…

On nage donc en pleine absurdité : on cache des cheveux par d’autres cheveux, on masque le signe distinctif des femmes mariées (à moins que la perruque soit clairement reconnaissable), on rend souvent plus attirante une femme aux regards étrangers alors qu’elle ne devrait l’être que pour son mari (mais peut-être que celui-ci se complet du regard concupiscent de rivaux potentiels…), on a toute les chances de porter sur soi un rebu de paganisme…

La seule logique qui demeure : les vrais cheveux sont cachés, donc la lettre de la règle respectée et la femme joliment emperruquée sait pour elle-même que c’est bien l’apparat des épouses fidèles… celui qui s’approcherait trop près s’en rendrait lui-aussi compte…

Ce qui est aussi très discutable, c’est le fait de porter les cheveux d’une autre et de se rendre complice d’un trafic de cheveux le plus souvent vendus par des malheureuses pour quelque argent… On porte donc sur la tête un symbole de l’injustice du monde actuel : les malheureuses femmes du tiers monde vendent à bas prix leur parure féminine pour permettre à des femmes occidentales de se sentir plus belles en dépensant de fortes sommes pour cela. Or le judaïsme nous invite à la solidarité humaine et non à l’exploitation de la misère des autres.

On voit donc que la perruque est une pratique pour le moins contestable dans le cadre juif. Elle est d’ailleurs contestée dans certains milieux orthodoxes qui lui préfèrent le foulard ou le turban (qui peuvent être très élégants, même si de nombreuses femmes orthodoxes se coiffent de façon quelconque).

La perruque reste néanmoins la norme chez bien des sous-courants de l’orthodoxie, notamment chez une bonne part des hassidim, comme les Loubavitch, les Belz et d’autres… mais certains y sont toujours fermement opposés.

Notre position pratique :

C’est pourquoi, au bout du compte, ce genre d’insertions « il ne faut pas voir le cheveu d’une femme », « la voix d’une femme est impudicité », doit être remise dans son contexte socioculturel et textuel. Celui qui veut interdire peut toujours trouver un raisonnement pour le faire et encore mieux un texte.

Pour nous, Massorti, il s’agit avant tout d’une question de mœurs et de mentalité. Nous vivons en Occident, les femmes juives sont libérées et indépendantes. Il n’est pas question de les « répudier » parce qu’elles parlent à quelqu’un, et encore moins parce qu’elles sortent sans chapeau…

En cela nous ne sommes pas les seuls et des rabbins extrêmement orthodoxes vont également sur ce chemin, Moshe Feinstein dit qu’à notre époque on est tellement habitué à voir les cheveux des femmes découverts qu’on ne peut plus considérer cela comme erva (Igrot moshe Orah Hayim 42).

Ajoutons enfin que celui qui veut se comporter strictement selon le Shoul’han ‘aroukh, doit suivre également le texte suivant (E.H 21.1) : « un homme doit s’éloigner des femmes le plus possible. Il ne doit pas lui faire des signes avec la main ou le pied, ni avec les yeux. Il est interdit de rire avec elle, d’avoir une conduite légère, de regarder sa beauté. Même respirer son parfum est interdit. Il est interdit de regarder les femmes à la lessive. Il est interdit de regarder les vêtements colorés d’une femme que l’on connaît, même si ceux-ci ne sont pas sur elle, de peur qu’il se mette à penser à elle. Si l’on rencontre une femme au marché il ne faut pas la suivre, mais au contraire partir de l’autre côté. Il ne faut pas se trouver devant la porte d’une prostituée, même à quatre pas. Celui qui regarde ne serait-ce que le petit doigt d’une femme avec une pensée érotique, c’est comme s’il avait vu son sexe. Il est interdit d’écouter la voix d’une femme et de voir ses cheveux. Celui qui transgresserait un seul de ces interdits mérite la punition corporelle. »

Il va sans dire que si ce texte, malgré sa connotation puritaine très marquée (16ème siècle rappelons-le) conserve une certaine pertinence en ce qui concerne une conduite pudique et prudente vis-à-vis d’une séduction à éviter ; il montre aussi l’exagération donnée à la vision du cheveu féminin ou de l’ouïe de la voix féminine.

C’est pourquoi, s’il est légitime pour une femme de vouloir faire perdurer cette coutume ancienne et, somme toute, respectable et de se couvrir la tête pour prier ou entrer dans une synagogue ; elle doit le faire de son propre chef et parce que cela lui apporte quelque chose.

Il est par contre assez inquiétant de voir certains rabbins faire pression sur leur public féminin afin qu’il se couvre la tête… le voile islamique n’est pas loin et relève exactement du même problème.

Il faut noter enfin que Maïmonide (qui vivait en milieu musulman au XIIIe siècle) prône le port d’un foulard pour les jeunes filles (Hil. issouré bia 21:17).

Il faut encore préciser que cet usage était en vogue également chez les chrétiens, voilà ce qu’en dit le Décret de Gratien (canoniste italien, XIIe s.) : « La femme doit avoir la tête voilée parce qu’elle n’est pas à l’image de Dieu. »

Conclusion :

Le fait se couvrir la tête pour une femme est une très ancienne règle du judaïsme. Cette règle mérite d’être respectée. Cependant, elle doit être comprise dans un certain contexte culturel et de ce fait il n’y a rien de choquant pour nous aujourd’hui et dans nos milieux qu’une femme choisisse de ne pas la respecter. Il est hors de question, au sein du mouvement Massorti, de faire pression pour qu’une femme se couvre la tête. Notre rôle est d’informer afin de permettre à chacun de respecter ou non ce genre de règles, dans la mesure où cela ne gêne pas le public qui fréquente nos synagogues. Par contre, une femme devra se couvrir la tête si elle choisit de fréquenter une synagogue ultra orthodoxe où tel est l’usage, de même qu’elle devra se plier à toutes les règles vestimentaires de cet endroit par respect pour lui et le public qui le fréquente.

Yeshaya Dalsace

Contre la perruque

Le rabbin Eliachiv, dirigeant des Haredim "lituanien" parle contre l’usage de la perruque féminine pourtant très en vogue dans son milieu. Il considère cela comme une véritable "plaie" trop répandue dans son milieu haredi, notamment chez biens des femmes de rabbins pour être éliminée.

Ce qui est intéressant c’est la difficulté d’un tel personnage à assoir son autorité dans son propre milieu sur une question aussi banale. Intéressant également que ces rabbins attribuent à la perruque la source de biens des problèmes que vit le monde haredi ; ils y voient une négligence, un signe de relâchement et voudraient que cet usage disparaisse.